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| | | expédition et conquête d'Alger |
| Je rapporte ici un près agréable texte de souvenir qui m'a été transmis par gérard STAGLIANO, un des amis d'une de mes belles soeurs bien plus jeune que moi. Les STAGLIANO demeurait dans un quartier plus à l'ouest que moi, tout près des deux moilins et étaient de fervents habitués des "plages" de Saint -Eugène.
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| Vous en souvient-il ?
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| Tout de suite après la guerre, je parle de 1939-1945, il y avait à
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| Saint-Eugène, une marchand de poissons ambulant qui parcourait de la
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| mairie aux Deux-Moulins, toute l'avenue Maréchal-Foch, et revenait
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| par le boulevard Pitolet pour vendre ses poissons. Ma mère
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| surveillait son passage, toujours bruyant pour attirer le chaland
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| bien évidemment. Quand il arrivait sous l'immeuble de Pierre
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| Portelli, au 166 bis, où nous habitions. Il déposait son cageot par
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| terre, mais la marchandise était dissimulée sous un linge humide, un
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| sac de jute, imbibée d'eau, pour que le ou les poissons ne souffrent
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| pas trop de la canicule. Ma mère sortait la tête et le haranguait de
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| la fenêtre de sa chambre, depuis le 3e étage : "Qu'est-ce que tu as
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| de bon aujourd'hui ?" Pour n'obtenir que la même et lancinante
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| réponse, péremptoire de surcroît : " Descends !". Le plus souvent,
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| il avait de grosses crevettes rouges *, la maternelle en prenait
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| 1,500 kilo pour deux francs six sous, qu'elle nous préparait de deux
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| manières, avec les grosses têtes et leur pattes qu'elle écrasait
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| dans un gros pilon de marbre gris, elle faisait une soupe de poissons
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| très odorante, mais moins que celle qu'elle faisait avec le crabes
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| que nous attrapions sur les rochers de la plage de l'Indépendance,
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| les crabes à poils, jaunâtres ou « Ériphia Verrago » **. Quant
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| aux belles queues, elle nous les préparait en court-bouillon
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| mayonnaise. D'autre fois, elle faisait les crevettes, entières, à la
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| sauce armoricaine avec des pâtes, le plus souvent des spaghetti qui
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| avaient la prédilection paternelle. D'autres fois, c'était un cageot
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| entier de rougets de vase, les plus goûteux, comme chacun sait,
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| qu'elle faisait frire légèrement farinés et qu'elle présentait à
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| table en montagne, toujours pour deux francs six sous. Si
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| d'aventures, nous rechignons à les dévorer, c'était mauvais signe.
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| Et à la fin du repas, on avait droit au thermomètre au trou du pet,
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| l'histoire de vérifier s'il n'y avait pas anguille sous roche :
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| angine, rhume des foins etc. Mais la mémoire maternelle vacille sur
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| le prénom du vendeur ambulant, elle ne se souvient plus du prénom,
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| elle avance Azziz mais sans conviction, moi, mais je ne sais pas
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| pourquoi, je dirai Areski. Sans l'affirmer.
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| Sur la fin, ce brave ne déambulait plus, on lui avait octroyé une
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| petite voûte, à l'arrêt de la mairie de Saint-Eugène, il y avait
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| d'un côté, la montée en macadam pour aller au chemin des chèvres
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| et à Notre-Dame d'Afrique, qui débutait devant la villa des Chanlon
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| et du moutchou qui vendait le beurre arabe, de l'autre un escalier
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| confortable qui rejoignait cette montée. À la base de l'escalier, du
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| côté de la Poste, c'est là que se trouvait la voûte et notre
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| Areski ou Azziz ! Vous en souvient-il ? Et du prénom dudit
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| poissonnier ?
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| gerard-stagliano@wanadoo.fr
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| * Ces crevettes sont curieusement appelées "gambas" de leur nom
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| espagnol sur la Côte d'Azur ou la plupart des gens sont Italiens
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| d'origine.
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| ** À Marseille, ces crabes poilus sont appelés des Fioupélans, un
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| joli nom en l'occurrence. (Voir photo ci-dessous).
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