Piraterie rifaine
La piraterie dans le Rif et la politique
1. L'arrière plan historique de la piraterie rifaine.
La piraterie est l'une des plus vieilles activités maritimes de la Méditerranée.
Tous les peuples du bassin méditerranéen, depuis l'Antiquité jusqu'au XIX siècle ont pratiqué la piraterie.
Pour l'Afrique du Nord, l'age d'or de la piraterie remonte au XVè siècle. A cette époque, les pirates ou pour mieux dire les corsaires barbaresque
élargissaient le champs de leurs opérations à partir des côtes tunisiennes et algériennes, au delà du Détroit de Gibraltar.
La situation géographique du Rif et la richesse de ses forêts en bois de cèdre ne pouvaient pas ne pas attirer l'attention des corsaires algériens qui venaient s'installer provisoirement à Badis.
Après l'arrivée des "Morisques" expulsés d'Espagne au début du XVII è siècle, la course marocaine prend alors, une nouvelle dimension.
Les corsaires de Salé, particulièrement favorisés par leur position proche du Détroit de Gibraltar lançaient leurs opérations contre les bateaux espagnols allant et revenant du Nouveau Monde.
A cette époque, les Rifains se livraient déjà à la course avec les moyens du bord pour répondre aux attaques espagnoles.
Malgré les efforts déployés par les puissances européennes pour mettre fin au "jihad" sur les côtes marocaines, cette activité ne s'éteignit jamais.
Jusqu'à la fin du XIX è siècle, les Rifains étaient obligés de mener leurs actions contre les navires étrangers qui s'approchaient de leurs côtes pratiquant la contrebande, ...etc
Les Européens voyant dans ces opérations les restes d'une piraterie gênante pour leur activités commerciales, mais aussi un bon pretexte pour arracher au Makhzen des dommages et intérêts qui ruineraient son trésor et rabaisseraient sa souveraineté.
Origines et développement de la piraterie
La piraterie est une activité très ancienne qui n'a cessé de paraitre sur toutes les mers du globe et à toutes les époques, depuis l'Antiquité jusqu'à l'époque Moderne.
Ainsi, comme dit Fernand BRAUDEL la piraterie en Méditerranée est aussi vielle que l'histoire.
L'une des premières difficultés que rencontre l'historien des pirates est le problème de la définition du mot "piraterie" lui-même.
Le pirate, comme le définit WEBSTER est "un voleur en haute mer, celui qui par la violence ouverte s'empare en haute mer des biens d'une autre personne, spécialement celui qui fait métier de croiser pour voler ou piller; un écumeur des mers ; également celui qui vole dans un port (cité par Philip GOSSE, Histoire de la piraterie, Paris 1978, p.10)
Quand à la course qui est, selon le Petit Robert une "action de parcourir le pays, la mer pour faire du pillage" est une sorte de guerre maritime licite qui avait "ses lois, ses règles, ses vivantes coutumes et traditions" (F. BRAUDEL : La Méditerranée et le monde Méditerranéen à l'époque de Philip II, Ed. Armand Colin, 1987 T.II, p.191)
Le mot "course" correspond au mot arabe "qarçama" on confond parfois "course" et "piraterie" dans les archives marocaines.
La "qarçama" était la course "oficielle" par contre la piraterie et notamment "les pirates rifains" sont désignés dans les documents nationaux marocains comme "foussades" c'est-à-dire comme des "malfaiteurs"
l'age d'or de la piraterie moderne
L'apogée de la piraterie moderne remonte au XVI è et XVII è siècle, c'était l'époque des frères Barberousse qui vinrent s'installer sur les côtes de Tunisie puis d'Algérie.
Kheyr Ed-Dine qui succèda à son frère Arouj devint l'un des plus puissants Rais musulmans en Méditerranée.
Il fut désigné par le Beglebeg d'Alger (sultant otoman) comme Amiral de toutes les flottes ottomanes.
Dès lors, les deux plus grandes puissances maritimes, l'Espagne et l'Empire Ottoman ne cessèrent de s'opposer.
Au XVII è siècle, Alger devint le principal centre des corsaires africains.
Cette ville allait connaitre la prospérité grâce au butin que les pirates ramenaient et surtout grâce à l'acquisition qu'ils firent de nouveaux vaisseaux ronds, c'est-à-dire de voiliers à phares carrés qui étaient utilisés à l'époque dans l'Atlantique "Ce fut une transition tout aussi importante que le passage de la voile à la vapeur" nous dit Fernand Braudel, il poursuit : "Il n'y a pas de course sans butin"
En conclusion Alger, allait se gonfler de richesses surtout depuis que les corsaires pillulaient au-delà de Gibraltar.
Les corsaires algériens et les Chrétiens
La côte rifaine qui se trouvait sur le chemin des corsaires algériens devint une base importante dans les opérations qu'ils menaient contre les chrétiens, surtout contre les espagnols qui attaquèrent la ville de Badis plusieurs fois avant de la détruire définitivement et de s'emparer du Penon qui sera baptisé plus tard Penon de Velez.